Dans notre pratique de Yoga, comment suivre harmonieusement l’énergie de saison et accompagner l’entrée dans l’automne ?
Le grand jeu du Yin et du Yang dans les saisons
En octobre, l’été flamboyant n’est plus qu’un souvenir. Mi-août déjà, qui contemple son jardin ressent les premiers signes d’un retournement : les premières feuilles jaunissent, s’assèchent, les fruits mûrissent et tombent vers le sol, la sève des arbres se retire vers les racines. L’automne est la résultante du grand jeu des énergies de printemps et d’été, naissance et maturation. L’énergie centrifuge de la nature atteint son summum au début de l’été (yang) et reflue ensuite graduellement vers les profondeurs, s’y rassemble, se contracte (yin).
L’automne, la saison du « blues »
La nature se prépare aux rigueurs de l’hiver, le temps rafraîchit, les végétaux se dessèchent. En énergétique chinoise, la saison est représentée par l’élément métal ou plutôt son « agir » : une densification au sein de la terre.
À cette saison du Métal, nous ressentons souvent de la nostalgie, une certaine tristesse, c’est la saison du « blues »… La rigueur du froid sec dessèche la végétation, la sève se retire des extrémités. Le Yin augmente, c’est la saison des récoltes et de l’engrangement, de la prévoyance. Les forces se répartissent dans les graines et le temps est à l’endurance, au ralentissement. L’énergie se resserre et nourrit les processus dans la durée et l’attente fertile.
Dans le corps humain, l’organe (Yin) correspondant au Métal est le poumon et la viscère (Yang) qui lui est couplée est le gros intestin (le poumon et le gros intestin absorbent l’oxygène/les aliments et les condensent/expulsent, à l’image des matières végétales transformées en humus). L’énergie de saison affectera donc particulièrement le poumon et le gros intestin. En automne l’énergie du poumon, lorsqu’elle est saine, aide au retour en soi. Le souffle s’amplifie et ouvre l’espace intérieur à la méditation. Au contraire, si l’énergie du poumon est faible, l’être humain dès lors vulnérable aux émotions liées au métal, peine à accepter les changements et se laisse envahir de tristesse et de mélancolie jusqu’à la dépression.
« Nous ne pouvons nous empêcher de penser à la période romantique, où la tuberculose faisait des ravages et où l’émotion dominante était faite de tristesse et de mélancolie. A cette époque, Laennec, l’inventeur du stéthoscope, avait surnommé la tuberculose la « maladie des passions tristes.» (Yves Réquéna et Marie Borrel, Le Guide du bien-être selon la médecine chinoise, Ed. Trédaniel, Paris, 2000).
Le Yoga de l’automne, pour renforcer et protéger le poumon
L’automne est donc la saison où nous porterons une attention particulière au poumon et à l’énergie de protection du corps (nommée Wei Qi en énergétique chinoise) qu’il gouverne. Dans notre pratique corporelle de Yoga ou de Qigong, pour fortifier le poumon, nous veillerons à réguler l’inspiration et l’expiration ; nous favoriserons tous les types de Prānāyāma avec rétention à l’inspiration ; nous chercherons à développer les qualités liées au métal, telles l’attention, la conscience de l’espace, l’équilibre, le sens de notre valeur profonde, la relation entre l’intérieur et l’extérieur, la clarté. Ainsi toutes les postures d’équilibre, une attention accrue à notre position dans l’espace, ou encore la conscience de Sahasrāra (çakra du lotus aux mille pétales, au sommet du crâne), demeure de Shiva, la Conscience infinie et inconditionnée, sont à favoriser. Sahasrāra, en effet, représente la possibilité de transcender le champ de la manifestation et nous y retrouvons les qualités de malléabilité et de pouvoir de transformation du métal. La fontanelle ouverte des nouveau-nés est en effet la porte de passage entre les énergies spirituelles du Ciel et matérielles de la Terre. Celle-ci doit se refermer peu à peu pour permettre notre incarnation terrestre mais elle reste mobile et perméable, voie ouverte à la communication Terre-Ciel. Au niveau psychologique, nous ferons appel aux émotions positives du poumon, soit le courage et la détermination, pour contrebalancer les tendances négatives de découragement et de mélancolie.
Quelle pratique pour l’automne ?
1- ÂSANAS : postures qui ouvrent la cage thoracique
Matsyāsana, la posture du poisson
(jambes en posture du lotus, ou en tailleur ou même allongées)
Le Chat/Le Chien
Ustrāsana (le Chameau)
Bhujangāsana (le Cobra)
Dhanurāsana (l’Arc)
Trikonāsana (tous les Triangles)
Gomukhāsana (la Tête de vache)
Śīrsāsana : la posture sur la tête 
Toutes les postures d’équilibre, en particulier Vriksāsana, la posture de l’arbre
2-PRÂNÂYÂMA (respiration)
- Rétentions poumons pleins ; tapotements des poumons avec les poings, poumons en rétention et bombés.
- Samavritti prānāyāma, le prānāyāma en carré (inspiration, rétention à plein, expiration et rétention à vide de même durée, par exemple sur 3 ou 5 temps)
- Conscience et ralentissement du souffle pendant les āsanas
3- CONSCIENCE ET MÉDITATION
Porter l’attention sur :
- Sahasrāra, le lotus aux mille pétales situé à la fontanelle
- L’espace, intérieur et extérieur
- Courage, détermination et vigilance
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Karine Bayard